Sylvie courvoisier trio

Depuis le tournant des années 90 et son installation à Brooklyn, la pianiste suisse Sylvie Courvoisier trace, avec un sens aigu de l’orientation, un chemin aussi singulier que cohérent dans la jungle efflorescente des nouvelles musiques expérimentales, en inventant des formes mutantes et inédites aux confins de l’improvisation libre radicale, du post-jazz avant-gardiste et de la musique de chambre improvisée. Adepte d’un piano tout à la fois pulsionnel, gestuel et cérébral (où se décèle l’influence décisive du geste révolutionnaire de Cecil Taylor mais aussi la liberté lyrique d’un Paul Bley et dans un autre registre la prégnance d’un certain romantisme allemand…)
Sylvie Courvoisier franchit aujourd’hui une nouvelle étape en se présentant pour la première fois dans la configuration archétypale du trio piano/basse/batterie — épreuve initiatique incontournable de tout pianiste de jazz contemporain. Accompagnée par deux monstres sacrés de la scène downtown newyorkaise, le contrebassiste Drew Gress et le batteur Kenny Wollesen, extraordinaires de complicité et de fluidité organique, la pianiste y révèle une conception tout à la fois spontanée et concertée de l’exercice, domestiquant son lyrisme, sa fougue et son sens très personnel du swing dans des formes précisément agencées servant de vecteurs autant que de cadres à l’improvisation collective. À la fois poétique, mystérieuse et d’une grande intensité physique cette musique inspirée reflète de façon magistrale l’univers musical décidément pas comme les autres de Sylvie Courvoisier.

Stephane Ollivier, JazzMagazine/Jazzman